À la fin de mon adolescence, j'ai eu la révélation que je voulais vivre en forêt. Plusieurs documentaires, lectures et films dont « Into the Wild » ont grandement marqué ma perception du monde et de notre société. Il était alors clair pour moi que j'avais envie d'être en pleine communion avec la nature. J'ai cultivé ce désir durant plusieurs années avant de commencer à m'immerger en terres nordiques. En 2015, alors que j'étudiais pour mes examens du Barreau, un ami et moi avons acquis un petit camp de chasse et pêche à la Baie-James. À vrai dire, c'était une petite cambuse au poêle bois non installé, qui abritait toutes sortes de colocataires indésirables... souris, écureuils, araignées... Cela ne m'a pas empêché de partir avec l'intention de m'y installer durant un mois et demi pour vivre en nature. C'est à la mi septembre que je suis parti avec mon petit « pickup » rempli à ras bords que en direction de ces terres sauvages. Après plusieurs jours à caresser la solitude, j'ai rencontré deux hommes au bord d'un chemin forestier qui m'ont fait signe de m'arrêter. Ils m'ont demandé d'où je venais. Je leur ai répondu, un peu craintif, puis je leur ai retourné la question. Ils m'ont alors dit qu'ils venaient de Waswanipi. Mes yeux se sont remplis d'étoiles, des autochtones! C'était comme un rêve pour moi de pouvoir rencontrer des gens avec une si grande expérience et connaissance forestière. L'un deux, Sam, m'a pris sous son aile et nous avons alors vécu ensemble durant plus d'un mois. Chasser, pêcher, bucher du bois, rire et s'amuser faisait parti de notre quotidien. Nous avons forgé un lien pour la vie. Il m'appelait son fils blanc et moi mon père indien.
Le temps venu de faire mon stage du Barreau, j'ai envoyé mon CV en régions éloignées. Je voulais enfin émerger du cocon qui me retenait en ville; je voulais vivre en région. J'ai donc fait mon stage au Bas-Saint-Laurent / Gaspésie, dans une petit village entouré de forêts. Je n'oublierai jamais l'odeur douce et sucrée du sapin baumier qui enveloppait la ville lors de journée pluvieuses. Après mon assermentation, j'ai eu l'opportunité de travailler comme avocat à l'Aide juridique pour une clientèle inuite au Nunavik. Un poste s'est par la suite ouvert à Chibougamau. Cette ville étant en pleine forêt boréale, j'entrevoyais la possibilité d'habiter dans un camp à proximité et de pouvoir exercer ma profession d'avocat. De plus, le secteur couvert par l'avocat de Chibougamau comprenait Waswanipi. J'étais conquis! J'ai donc travailler comme avocat, jusqu'à ce que je me rende compte que mon envie de vivre en communion avec la nature était trop forte. J'ai alors démissionné pour partir vivre à temps plein dans les bois.
Après y avoir tant rêvé, voici enfin ma libération. L'expérience d'une vie en communion avec la nature, en marge de l'influence sociale... en marge du monde. Une vie loin du monde, mais près des gens. Une vie où la connexion est plus vraie. Une vie dans laquelle je suis infiniment petit. Ici, c'est dame nature qui mène le bal. Je vis alors au rythme des saisons et du soleil. J'apprends ce que c'est que d'avoir faim, ma relation avec la nourriture change. Mes soirées bordées par les flammes du poêle à bois sont porteuses de réflexions. Les aurores boréales éclairent mes nuits et mes rêves devenus réalités me réchauffent le coeur. Ma cabane illuminée au travers de la sombre forêt hivernale est sans l’ombre d’un doute le confort absolu. Je me sens vivant, je suis libre.
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